Nous sommes en réunion pour parler du comportement d'Anton le dictateur du CM1, l'aryen au problème d'égo démesuré avec une mère hystérique.
Moi depuis janvier j'alimente l'inspecteur avec des relevés de faits qui vont de la basse insulte à la maîtresse (rien que du classique hein, de la salope, de la sale pute, pas de truc un peu recherché comme "trou du fion" ou "cochon de pute" qui nous fait rigoler en salle des maîtres) à carrément la morsure en passant par toutes les fois où il retourne sa chaise en classe parce qu'il refuse de bosser parce que "c'est nul" ou celles multi-quotidiennes également où il sort carrément de la classe parce qu'il est contrarié.
On en avait parlé avant, on voulait qu'Anton aille se faire voir ailleurs pour son année de CM2. Mais, 5 minutes avant la réunion, l'inspecteur me dit qu'il ne peut que le proposer aux parents. Enfin, non, il pourrait l'imposer mais bon ce serait toute une histoire parce que ce serait une mesure disciplinaire. Euh ... ouais ... et alors, c'est quoi le problème? Allons-y, je pense qu'on a tout de même un dossier en béton là, donc on a de quoi en raconter des histoires. Non, lui apparemment, il ne trouve pas que ce soit suffisamment justifié, il préfère proposer aux parents, mais attention hein, s'ils refusent et qu'à la rentrée c'est le même problème alors là, ça va chier, il sévira! AAAAHHH faut donc attendre septembre ... ou octobre... ou juillet 2018 peut-être parce que là, gnaquer la maîtresse et l'injurier, se mettre debout sur la rambarde de l'escalier, tenter de passer par la fenêtre du premier étage et faire chier le monde en permanence, ce n'est pas suffisant.
La réunion démarre donc sous les meilleurs auspices.
La maîtresse, Thérèse Lafaille, commence à décrire la situation et évidemment, à quoi m'attendais-je, elle minimise. Je bous intérieurement, mais pourquoi elle fait ça? Elle espère quoi? De toutes les façons ces parents ne peuvent pas la blairer et la psy libérale, diplômée grâce à un appel au 6 22 22, est persuadée que le seul problème c'est elle.
Ensuite, vient le tour de parole du maître spécialisé G, l'homme grenouille, le répulsif à cafards. Il démarre en disant qu'il n'avait jamais entendu parler d'Anton jusqu'à cette année. Oui enfin tu t'occupes de maximum 2 gosses sur plus de 300 dans notre école chaque année et Anton n'a pas vraiment de problèmes scolaires en dehors de son comportement inacceptable et puis vu que t'es un gros naze et que tu passes dans l'école 45 minutes en moyenne toutes les 3 semaines on ne partage pas forcément avec toi nos problèmes mais vraiment je te remercie beaucoup pour cette posture qui nous aide, surtout quand tu ajoutes : "Si je n'avais que des élèves comme Anton, je serai heureux!"
Mais non! Mais il est con lui? Pas de doute, il l'est!
La réunion se poursuit, on expose à quel point Anton doit apprendre à accepter la frustration, et bien que tout le monde reste courtois ni la psy en libéral ni les parents n'ont trop l'air de comprendre ni d'adhérer, ils restent sur les thèmes "il y a un problème avec cette maîtresse" et "notre fils est stigmatisé". On donne l'exemple des séances de musique avec l'intervenante auxquelles Anton refuse de participer. Et là, Glouglou, l'homme qui a un œil qui regarde par le trou de la serrure pendant que l'autre fait le guet dans le couloir, celui qui est capable de te dire 22 fois en 1 minute qu'il est important de "faire sens" et que toi tu n'as pas dû savoir "faire sens" si Anton a balancé à travers la pièce le papier d'autorisation de sortie que tu lui donnais simplement pour qu'il le transmette à ses parents, celui qui, pour "faire sens" sûrement, n'a rien trouvé de plus élaboré que d'emmener chacun des élèves dont il s'occupe sauter à cloche pied ou jouer au ballon dans le préau et ce depuis que je le connais, lui, maître Gros relou qui n'a pas eu à gérer plus de 2 élèves en même temps pendant plus de 45 minutes depuis 15 ans minimum, après avoir prodigué devant tout le monde et donc de façon totalement déplacée ses précieux conseils pédagogiques à Thérèse Lafaille pour qu'elle devienne une meilleure enseignante mais "il ne faut pas culpabiliser", a dit avec force conviction, content de lui le mec : "Ah propos de musique, Anton m'a parlé d'un certain Black M, ce serait bien qu'il puisse faire un exposé à son sujet en classe!"
Mais il a craqué le requin marteau?
Sérieusement ? tu ne connais ni les programmes, ni la façon de travailler de l'enseignante, ni visiblement ce "certain" Black M mais tu oses asséner cela. Et si les élèves ne font pas d'exposés cette année? Et s'ils ne font pas d'exposés libres qu'est-ce qu'il se passe? La classe va devoir supporter un exposé sur Black M entre un exposé sur Michel-Ange et un autre sur Léonard de Vinci? On n'est pas censé leur apprendre 2 ou 3 trucs à l'école?
Evidemment, la mère a sauté sur l'occasion pour dire que ce serait quand même beaucoup mieux si en début d'année, on laissait aux élèves le soin de choisir les chansons qu'ils voulaient apprendre. Ben oui tiens, pourquoi s'embêter à écrire un projet pédagogique, de toutes les façons, comme tout le monde le sait, le but ultime d'une année scolaire, c'est le spectacle de la kermesse! Alors pourquoi, pour tenter de ne pas déclencher le courroux d'Anton, ne pas faire un groupe qui chante du Black M, un groupe qui chante du Maître Gims et un groupe qui chante du Jul en mettant leurs doigts en l'air comme s'ils répétaient un toucher gynécologique. Hein, pourquoi?
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